Interview: Papy TAMBA parle du bilan des administrateurs nommés par l’Etat congolais en 2018 au sein de la Sucrière de Kwuilu Ngongo et réclame 19 mois de ses arriérés d’émoluments


Nous étions 2 médias en ligne à interviewer celui qui se fait appeler le Papy le plus célèbre de la République Démocratique du Congo, pour tenter de comprendre ce qu’a été leur action avec ses collègues administrateurs nommés par l’Etat congolais au sein du conseil d’administration de la Sucrière de Kwuilu Ngongo.

Vraies-infos.net et Échocongo.net ont fait le déplacement dans son bureau de travail situé sur l’avenue du Colonel Mondjiba qui prolonge le boulevard du 30 juin pour un débat sans tabous ni faux fuyant.

Égal à lui-même, l’homme n’a esquivé aucune question. L’ambiance était très conviviale et l’interview qui a commencé à 17h00 ce lundi 21 novembre 2022 a pris fin à 19h30. Il est fortement recommandé aux congolais de lire ce document qui révèle beaucoup de choses sur la vie de la Sucrière de Kwuilu Ngongo.

Vraies-infos.net: Monsieur Papy TAMBA bonjour. Nous ne sommes pas venus vers vous dans le cadre de vos activités politiques. Mais il nous arrive très souvent de parcourir certains commentaires dans les réseaux sociaux, dans lesquels vos pourfendeurs questionnent votre bilan au sein de la Sucrière de Kwuilu Ngongo. Que pouvez-vous répondre par rapport à cela ?

Papy TAMBA: Merci pour cette question et pour vous être déplacé jusqu’ici pour avoir les vraies informations, comme d’ailleurs s’appelle aussi votre média. Je vous salue aussi.
Pour répondre à votre question, il est important de commencer par quelques précisions.
Tout d’abord, avant notre nomination, la Sucrière de Kwuilu Ngongo a fonctionné sans la présence des administrateurs congolais au sein du conseil d’administration de 2013 à 2018. Il y a eu des nombreux blocages de l’actionnaire privé belge qui développait toute sorte de prétexte pour accepter la présence des administrateurs nommés par l’Etat congolais au sein du conseil d’administration

Vraies-infos.net : Mais pourquoi ?

Papy TAMBA : Si vous me laissez poursuivre mon raisonnement, vous comprendrez les raisons.
Pour enchaîner ma réponse à votre dernière question, il faut aussi noter les relations entre l’Etat congolais et l’actionnaire privé FINASUCRE ont souvent été très tendues. Il est arrivé même quelques fois où cette tension a failli faire apparaître un défaut d’affectio societatis.

Vraies-infos.net: Vous m’excuserez de vous interrompre de nouveau, que veut dire défaut d’affectio societatis ?

Papy TAMBA : par défaut d’affectio societatis, il faut comprendre une sorte de rupture de confiance entre les associés qui refusent de travailler ensemble pour un intérêt commun. C’est motif très sérieux pour que le tribunal de commerce prononce une rupture de la société. Il faut donc comprendre que la Sucrière de Kwuilu Ngongo a frôlé cette situation. Les raisons d’une telle situation sont multiples. Mais je peux en relever quelques-unes :

1. Le refus de l’actionnaire privé FINASUCRE concernant la nomination d’un Administrateur Directeur Général Adjoint au sein de la Compagnie Sucrière, car cela devrait conduire à la modification des statuts de l’entreprise.
Sur ce point précis, j’ai le bonheur de vous annoncer que nous avons pu obtenir cette modification, avec le concours du ministre de portefeuille.
Un autre fait à soulever que lorsque nous avons été nommé, nous avons trouvé une demande de désignation d’un avocat au Ministre de la justice. Vous pouvez donc comprendre que la tâche n’était pas aisée.

Echocongo.net: Qu’avez-vous donc fait pour rétablir la confiance ?

Papy TAMBA: La toute première chose à faire était d’abord d’occuper l’espace et de maîtriser les enjeux. Cela nous a pris quelques mois, car il fallait d’abord confronter le modus operandi avec la loi de l’espace OHADA et la législation congolaise. La gestion et les pratiques qui se sont forgées avec le temps où FINASUCRE a fonctionné seule au conseil d’administration sans les représentants de l’Etat congolais devraient passer au scanner de la rationalité.. C’est alors que nous avons commencé à dénoncer des actes de mégestion à travers des notes techniques qui sont encore tracables aujourd’hui. Ceci nous a permis de faire des propositions des créations des comités spécialisés (audit, bonne gouvernance, litiges, ressources humaines et rémunérations) pour pallier aux insuffisances constatées dans la gestion.
En dehors de tout cela, nous avons aussi décrié le fait que toute la chaîne de production, logistique distribution ainsi que de dépenses soient contrôlées par des expatriés (belges, mauriciens et indiens), au détriment des congolais compétents et expérimentés, dont l’ancienneté dans l’entreprise est loin antérieure à celle de ces expatriés. Malheureusement, tous ces dysfonctionnements constatés et toutes nos initiatives ont rencontré une fin de non-recevoir auprès de l’actionnaire privé belge qui dispose de la majorité des voix au seiin du conseil d’administration.

Echocongo.net: Monsieur Papy TAMBA, pouvez-nous expliquer comment fonctionne le conseil d’administration de la Sucrière de Kwuilu Ngongo ? Pour le reste, nous promettons de revenir sous peu pour la suite de notre interview, car la matière nous paraît très intéressante

Papy TAMBA: Je suis obligé de me soumettre à votre volonté. Sinon, j’ai encore des choses à dire sur la convention réglementée et le contrat AMSCO. Mais ce n’est que partie remise.

Pour revenir à votre question, le fonctionnement du conseil d’administration de la Sucrière de Kwuilu Ngongo est lié à son histoire. Faisant partie des sociétés zaïrianisées, la Sucrière de Kwuilu Ngongo a frôlé la faillite en 1978. Pour la sauver, un accord fût conclu entre la République du Zaïre de l’époque et FINASUCRE. Ainsi, la Sucrière est devenue une entreprise d’économie mixte, récapitalisée à 10 millions des dollars. La clé de répartition du capital fût de 60% pour FINASUCRE et de 40 % pour la république du Zaïre. Mais le Zaïre qui manquait des capitaux a procédé par un emprunt à FINASUCRE pour couvrir ses parts sociales représentant 4 millions des dollars.

En marge de cet accord, une incise stipulait que la moitié des dividendes qui revenaient au Zaïre pour chaque fin d’exercice comptable devrait servir au remboursement de ladite dette, jusqu’au remboursement complet.

Echocongo.net: Tout naturellement, cette dette n’était qu’un souvenir à votre arrivée dans la compagnie…

Papy TAMBA : Non, malheureusement. N’importe qui à votre place exprimera les faits de cette manière. Ça coule de source. Sauf que cela n’a pas été le cas. Quarante années plus tard, le remboursement n’avait toujours été totalement exécutë. Mais rassurez-vous, notre action au sein du conseil d’administration l’a permis. Ce n’est plus qu’un vieux souvenir.

Vraies-infos.net: comment avez vous fait pour réussir un tel exploit ?

Papy TAMBA : la première chose est que nous sommes entrés en fonction sans aucun complexe. Ne perdez pas de vue que la Sucrière a été créée vers les années 20, soit 40 années avant notre indépendance. Vous pouvez encore vous rappelez des affres de la colonisation. Il y a tout un état d’esprit qui a guidé son fonctionnement. Même sans le vouloir peut-être, nous avons tout de même observé certains comportements qui ressemblaient à du mépris. En même temps, dans plusieurs décisions, nous étions butés devant la majorité de Finasucre et c’est tout à fait normal dans ce genre d’entreprises. C’est ainsi qu’il nous a fallu fonctionner avec tact et méthodes. Nous croyons très sincèrement avoir fait un travail remarquable qui a balisé le terrain pour la nouvelle équipe

Echocongo.net: justement, parlons de cette nouvelle équipe. Le président de la république n’a nommé que le PCA et le DGA, sans toucher aux administrateurs. Comment expliqiez-vous cette situation ?

Papy TAMBA: le dossier que vous soulevez dénote la mauvaise foi de Finasucre. Avant d’allez plus loin, je me permets d’abord de vous expliquer le contexte.

1. Nous avons été nommé sur ordonnance présidentielle pour un mandat de 3 ans, selon les statuts de la Sucrière. Notre mandat a pris fin au mois d’avril 2021. Cela a été sanctionné par un PV au sein du conseil d’administration. Sauf que juridiquement, ce n’est pas cela qui met fin à notre mandat. Il faut un acte contraire, en l’espèce une autre ordonnance de désignation des nouveaux mandataires pour le compte de l’Etat congolais. En l’absence de ce document et pour éviter la carrence, le ministre de portefeuille, par deux correspondances, a écrit au conseil d’administration de nous garder en poste, jusqu’à l’avènement dudit acte contraire. Toutefois, cette position est confortée par la constitution, le droit administratif et la loi de l’espace OHADA. Mais contre toute attente, l’actionnaire belge Finasucre s’est interposée et la direction a été instruite pour bloquer nos émoluments d’administrateurs. Un abus de pouvoir à outrance. C’est dans cette condition que les administrateurs représentant l’actionnaire privé Finasucre ont siégé seuls au sein du conseil d’ administration. C’est extrêmement grave. Normalement, tous les actes posés par eux sont nuls et de nul effet. J’envisage d’ailleurs de saisir le conseil d’Etat, quant à ce. Les administrateurs aussi ont des droits propres à faire prévaloir…

Pour revenir à l’ordonnance du Chef de l’Etat qui nomme effectivement un nouveau conseil d’administration, vous avez raison de soulever qu’elle n’a procédé qu’au remplacement du DGA et du PCA

Echocongo.net: et quel est votre sort en tant qu’administrateur ?

Papy TAMBA: si le droit doit s’ appliquer correctement, cette ordonnance nous laisse en poste, moi et mon collègue le docteur Lianza. Mais est-ce qu’il y a la volonté de faire respecter la loi ? Ça je l’ignore. Mais en attendant, je dépose des demain une lettre de réclamation de mes émoluments d’administrateur de 19 mois auprès de la société Sucrière et comme vous le savez, la cour de cassation pour les litiges commerciaux dans l’espace OHADA est à Abidjan. Je ne compte pas me laisser faire devant la mauvaise foi de Finasucre. David aussi a vaincu Goliath et je me nourris de cet exemple. Dieu est au contrôle de tout.

Vraies-infos.net: votre mot de la fin ?

Papy TAMBA: Je souhaite vivement vous parler des conventions réglementés et des raisons qui ont plusieurs fois bloqués l’adoption des états financiers. Mais je vous informe que l’ai joué un très grand rôle pour concilier les vues au sein du conseil d’administration. Mais je suis très mal remercié. J’ai hâte de répondre à une nouvelle invitation.

Propos recueillis par :
Les médias Vraies-infos.net et Echocongo.net

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